15 – Poste royale

La poste royale

Jusqu’à l’avènement du chemin de fer au milieu du XIXe siècle, le cheval au galop fut le moyen le plus rapide de se déplacer et de transmettre des informations.
A condition pour les messagers (appelés « courriers ») de pouvoir changer de cheval tout au long de leur parcours car « qui veut voyager loin, ménage sa monture » ! En effet, un cheval galopant en moyenne 20km/h a ensuite besoin d’un temps long de récupération.
Il faut alors plusieurs chevaux pour parcourir les centaines de kilomètres qui séparent les grandes villes. Le relais de poste est le lieu où étaient tenus prêts des chevaux frais pour les cavaliers (et plus tard pour les voitures hippomobiles), afin de permettre une vitesse maximale à la communication par courrier.
Le système, permettant au cavalier d’échanger de relais en relais, un cheval fourbu contre un cheval frais, fut mis en place en France par le roi Louis XI vers 1476. Il est à l’origine de ce qui deviendra La Poste.
Louis XI (1423/1483) crée des relais de poste et le service des chevaucheurs du Roi en 1464 (par l’édit de Luxies). Les Chevaucheurs ne transportent exclusivement que la correspondance royale. Les itinéraires ne mènent alors qu’aux théâtres d’opérations militaires et ne sont établis qu’à titre provisoire. Les relais sont dirigés par des tenants-poste, précurseurs des maîtres de poste.
Le maître de poste est une personne, souvent un chevaucheur sédentarisé, qui tient un relais de poste aux chevaux. Il fournit, moyennant certains avantages, des relais aux voitures de l’administration des postes. Il dirige plusieurs personnes autour de lui : domestiques, postillons, valets et lingères. Cette charge, convoitée car liée à l’obtention de privilèges (comme par exemple l’exemption du paiement de la taille), comporte néanmoins de nombreuses obligations. Ainsi, le maître de poste doit-il résider sur place, posséder des bâtiments capables d’héberger équipages et montures mais aussi de stocker le fourrage, disposer d’un nombre suffisant de chevaux, marcher à toute réquisition (c’est-à-dire d’effectuer des déplacements extraordinaires pour la monarchie) et remplacer un confrère voisin en cas de défaillance.
Louis XII (1462/1515) met le service à la disposition du public en 1506. Des lettres patentes établissent des « chevaucheurs » dans les principaux passages et villes du royaume ou il est admis qu’ils peuvent tenir hôtellerie et relais. Et c’est ainsi que la Poste vit le jour.
Dans les faits, la « Poste aux Chevaux » naitra de la séparation du corps des « chevaucheurs du roi » en deux services distincts.
D’une part, certains de ces officiers vont continuer à assurer le transport des missives royales comme par le passé, pendant que d’autres se fixeront le long des routes privilégiées, et se chargeront de fournir des chevaux à leurs collègues restés mobiles.
Ce type d’installation donnera naissance aux relais de postes, appelés à l’origine « Postes assises ».
Au début de l’institution, certaines routes furent donc dotées provisoirement de « Postes assises » parce que le roi avait besoin d’une liaison rapide avec un point géographique déterminé. Ainsi, les deux premières « Postes assises » furent installées à Bordeaux qui commerçait avec l’Angleterre et… à Villeneuve-les-Avignon qui avait l’avantage d’être dans le Royaume de France, la ville la plus proche de la capitale de la Chrétienté qu’était devenue Avignon et avec laquelle il convenait de pouvoir communiquer.
Par ailleurs, à cette époque, l’aisance grandit, la bourgeoisie commençait à se déplacer pour les nécessités de son commerce d’argent. La mode devint même « d’aller aux eaux ».
Louis XII, comprenant ce besoin nouveau et désireux aussi de favoriser les bourgeois et de diminuer la distance qui les séparait des nobles, s’avise d’organiser un service des « Postes » et, petit à petit, l’institution s’élargit. Elle s’occupe d’organiser le transport des lettres des particuliers, et de transporter également les voyageurs et les marchandises. Et c’est ainsi qu’apparaissent vers le milieu du XVIème siècle, les premiers « coches publics » pour le transport des voyageurs.
Henri IV comprenant que la poste ne doit pas se contenter de transporter les dépêches du roi, mais doit encore servir à transporter les lettres des particuliers autorise en 1602 tous les citoyens à jouir des bienfaits de cette institution. C’était un énorme progrès qui voyait se créer le service des Postes aux Lettres » qui allait en produire un autre non moins considérable, celui du rendement des postes.
En 1630, Louis XIII (1601/1643) nomme des maîtres de courriers agréés, chargés d’améliorer le fonctionnement des postes et protéger les responsables des relais de la concurrence déloyale.
Le postillon est connu comme un homme chargé de mener une voiture hippomobile, tout comme le cocher. Mais alors que le cocher conduit l’attelage depuis la voiture, assis sur un siège, le postillon monte le cheval, ou l’un des chevaux (toujours, dans le cas où plusieurs chevaux forment l’attelage, le cheval de gauche) qui tirent le véhicule, et que l’on appelle le porteur. Dans le cas précis des voitures de poste qu’on appelait chaises de poste et qui n’avaient pas de place pour un cocher, le postillon était seul conducteur de l’attelage. Le travail du postillon de relais est d’accompagner les voyageurs entre deux relais, soit environ deux lieues (8 km), et de ramener ensuite les chevaux au pas, après un repos. C’est lui qui règle l’allure, et il est interdit de lui demander d’accélérer, sauf à lui payer « double poste ».
On appelle parfois « bottes de sept lieues » les bottes utilisées par les postillons. On pense généralement qu’elles sont ainsi nommées parce que les relais de poste sont distants d’environ sept lieues (environ 28 kilomètres). Mais les postes, distances entre deux relais, ne sont pas rigoureusement ni officiellement fixées : la distance varie énormément selon la nature des zones de parcours, plaines, montagnes, l’état des routes, etc. Elle est en moyenne, au XVIIème siècle, entre 16 et 20 kilomètres, soit quatre à cinq lieues. Suivant l’état des routes, ils sont distants de quatre à sept lieues (entre 16 et 28 kilomètres).
Les conditions de travail du postillon sont assez rudes, puisqu’il doit passer de longues heures à cheval, par tous les temps, sans protection contre les intempéries. Il met ses pieds dans de grandes et lourdes bottes de cuir bouilli – avec lesquelles il lui serait impossible de marcher – qui sont fixées sur les flancs du cheval et qui constituent une protection en cas de chute de la monture, les bottes étant suffisamment rigides (renforcées de fer) et épaisses pour supporter le poids du cheval sur la jambe. Les postillons des grandes compagnies de diligences portent une livrée caractéristique.
Sous Louis XIV (1638/1715), le réseau routier français est réparé, modernisé et fortement développé. En 1672, est créée une “Ferme générale des Postes”.
Sous le Premier Empire (1804-1814), on compte près de 1 400 relais de poste et 16 000 chevaux frais disponibles à travers la France.
En 1818, les distances peuvent se compter en lieues ou demi-postes.
En 1827, la Poste aux lettres et la Poste aux chevaux sont officiellement unifiées. Les relais de poste se transforment petit à petit en écuries, pour permettre la poursuite de l’acheminement du courrier avec des chevaux frais, en auberges pour la restauration du personnel des Postes et des voyageurs, et en gîtes pour leur hébergement. De nombreux établissement actuels trouvent encore leur origine dans un relais de poste.
Au nombre de 623 en 1632, les relais atteignent en France le chiffre de 1 426 à la veille de la Révolution et avoisinent les 2 000 en 1850. En effet, leur nombre ne cesse de croître dans la première moitié du XIXème siècle, en lien avec la densification du réseau routier. Les grandes voies reliant Paris à la province sont désormais complétées par des axes transversaux, tant régionaux que nationaux : aux visées politiques et stratégiques s’ajoutent désormais des impératifs économiques, afin de désenclaver certaines parties du territoire.
Les premières diligences de voyageurs, créées par Turgot, apparaissent en 1776. Les voyageurs qui font du commerce, les personnes de considération et les militaires qui rejoignent leurs garnisons sont les principaux utilisateurs de la Poste. Les services postaux se développent à partir de 1792 du fait de la révolution, quatorze destinations sont alors desservies dont la Normandie et les villes frontalières des Flandres quotidiennement. Les malles-poste apparaissent en 1793, d’abord avec trois chevaux de front, puis quatre en 1818. Elles deviennent un service journalier en 1828.
Concurrencés par le chemin de fer, dont le réseau s’étend rapidement sous le Second Empire et dont la vitesse surpasse celle de la malle-poste – les relais de poste voient leur fréquentation baisser. Ils sont officiellement supprimés en 1873.