17 – Chapelle Grisez

Une chapelle pour les Chapelons

En mars 2000, la commune de Lachapelle-sous-Rougemont devint propriétaire de la chapelle Grisez. En effet, les descendants de cette famille de brasseurs, résidant dans des régions géographiquement éloignées du village de leurs ancêtres et étant soucieux d’assurer la pérennité de l’édifice, avaient proposé à la Municipalité la cession de cet oratoire qui fait partie intégrante du patrimoine du village et représente une partie de son histoire. Le 23 septembre 2000 La Municipalité de Lachapelle, conduite par Jean-Louis Buchwalter, organise la cérémonie de passation des clefs et les Chapelons ont pu, à cette occasion, visiter les lieux.
C’est en 1880 qu’Adélaïde Grisez, née Kilcher, décida de faire édifier une petite chapelle à deux pas de la brasserie et de sa maison d’habitation. Adélaïde n’était pas chapelonne d’origine. En effet, elle était née en 1841 dans le village suisse de Boncourt, d’un père, Simon, premier magistrat de cette commune et juge au tribunal civil de Porrentruy.
Le fameux collège de Lachapelle joua un rôle décisif dans la venue d’Adélaïde à Lachapelle, puisque I‘un de ses frères y poursuivait ses études. Ainsi, à l’occasion de rencontres dominicales qui étaient alors rituelles entre Chapelons et habitants de contrées parfois éloignées, la famille Kilcher fit la connaissance de cette famille de brasseurs dans laquelle leur fille allait, à l’âge de dix-neuf ans, prendre époux. Le mariage d’Adélaïde et du jeune Jean-Baptiste Grisez eut lieu le 22 août 1860 à
Lachapelle et non à Boncourt, village de la jeune fille, comme l’aurait voulu la tradition. On mesure ainsi l’attrait qu’exerçait alors le village, en raison tout particulièrement, de l’existence du collège. Ce fut un mariage heureux, couronné par la naissance de trois filles et d’un garçon. L’édification de la chapelle correspond à la réalisation d’un vœu, très personnel, qui avait été fait par Adélaïde et qui engagera sa descendance jusqu’en l’année 2000.
Le vœu d’Adélaïde
Elle avait été très affectée par la mort de son père, Simon, et elle avait promis, lorsqu’elle sut que son mari Jean-Baptiste était très malade, de faire construire une petite chapelle s’il guérissait. En dépit du décès de son mari, elle mit à exécution son vœu, en demandant à la Vierge la protection de ses quatre enfants et la réussite dans les affaires de la brasserie familiale dont elle devait désormais assurer la charge.
Son époux, Jean-Baptiste, troisième brasseur et maire de Lachapelle, était décédé le 19 août 1875 à l’âge de quarante-cinq ans, des complications d’un diabète que l’on ne soignait pas encore à l’insuline. De nos jours, la construction d’un édifice religieux en réalisation d’un vœu qui, au demeurant, ne s’est pas réalisé, serait qualifiée de complètement anachronique et de particulièrement déraisonnable. En réalité, cette construction s’explique par deux éléments.
Tout d’abord, il y a la piété d’Adélaïde, une piété qui était connue et reconnue à Lachapelle et dans les environs.
Les Chapelons savaient que dans les conditions de transport difficiles de l’époque, elle avait effectué plusieurs fois un pèlerinage à La Salette, dans l’lsère, qui était un pèlerinage marial très fréquenté à la suite de l’apparition de la Vierge à deux bergers. Une certaine réputation de “sainteté” a d’ailleurs été associée au souvenir d’Adélaïde pendant une très longue période, jusque dans les années 1930.
C’est ainsi qu’après la mort d’Adélaïde, Eugénie Gros, dite “La Nini”, personnage un peu pittoresque qui demeurait dans la maison où se trouve l’actuelle perception, s’était cassé une jambe. Elle enfila dès qu’elle le put, un bas tricoté par “madame Adélaïde”, afin que celle-ci lui obtienne du Ciel une parfaite guérison. Le port du bas a-t-il été véritablement efficace ?
Un second élément expliquant la création de l’oratoire réside dans la crainte qu’avait Adélaïde, désormais veuve, de ne pouvoir faire face à l’éducation de ses quatre jeunes enfants et de ne pouvoir assurer la pérennité de la brasserie.
En 1875, l’aîné, Jean-Baptiste, n’avait que quatorze ans et la dernière, Marthe, née d’ailleurs à Boncourt, à peine cinq ans.
Par ailleurs, le devenir de l’entreprise familiale se trouvait, sinon véritablement compromis, du moins remis en question. Ainsi, la brasserie, en raison de l’annexion de I ‘Alsace par la Prusse en 1871, avait perdu les trois quarts de sa clientèle et l’entreprise, située dans la zone des douanes, subissait à présent des tracasseries administratives de toutes sortes imposées par les autorités françaises de Belfort. Par exemple, il fallut prouver que la bière qui y était fabriquée était un produit français et
qu’elle n’était pas un produit étranger ou de contrebande ! Les relations politiques dont disposait la famille Grisez furent alors totalement inefficaces, face à une Administration qui avait, par ailleurs, tendance à cultiver une certaine “espionnite”.
Le vœu d’Adélaïde a-t-il été exaucé ?
(Source : Une chapelle pour les Chapelons, par Yves Grisez, page 9)

Pour le centenaire de l’artistice, le 11/11/2018 , l’artiste Pierre le Preux a réalisé une fresque de 20m de long, inspirée par son grand-père, soldat marqué à vie par les horreurs de la Première Guerre mondiale. L’œuvre “Les yeux vides” a été installée dans la chapelle Grisez pendant un mois, vous pouvez en admirer quelques vues ci-après.